Lésions péri-articulaires et ligamentaires du genou, de la cheville et de l'épaule

Item 361 UE XII


 

Ce chapitre traite des principales lésions péri-articulaires non traumatiques touchant l'épaule, le genou et la cheville en insistant sur les tendinopathies et les bursopathies. Les lésions traumatiques, dont la luxation d'épaule ou l'entorse de cheville, ne seront pas abordées dans ce chapitre car traitées dans le référentiel d'orthopédie.

1 - Généralités

1.1 - Tendinopathies

Les tendinopathies sont une cause fréquente de douleurs des membres. Hormis pour les tendinopathies calcifiantes, elles sont d'origine mécanique et favorisées par des facteurs dits intrinsèques ou extrinsèques :

  • les facteurs intrinsèques sont propres à l'individu et non modifiables : âge, génétique, anatomie (morphologie de l'acromion pour l'épaule, par exemple) ;
  • les facteurs extrinsèques sont en rapport avec l'environnement : travail, loisir, etc.

La conjonction de ces deux types de facteurs va conduire au développement de lésions tendineuses d'origine traumatique ou microtraumatique. Il peut ensuite apparaître une phase chronique au cours de laquelle des processus de réparation vont se mettre en place.
Le diagnostic d'une tendinopathie est clinique (+++). L'interrogatoire recherche des facteurs favorisants : gestes répétitifs sportifs ou professionnels ou gestes traumatiques. La douleur est mécanique avec parfois une quelques atypies surtout à la phase initiale (douleur incomplètement soulagée au repos ou douleurs nocturnes lors des mouvements, très fréquent pour l'épaule).
L'examen physique repose sur une triade :

  • douleur à l'insertion ou à la palpation du corps tendineux ;
  • douleur à la contraction contre résistance ;
  • douleur à l'étirement du tendon.

À l'inverse, la mobilisation douce de l'articulation est indolore.
La radiographie standard de l'articulation douloureuse permet de rechercher un facteur favorisant, une calcification tendineuse ou un diagnostic différentiel (cause osseuse ou articulaire).
Les autres examens d'imagerie ne sont habituellement pas nécessaires en première intention et ne sont à réaliser qu'en cas de doute diagnostique ou de résistance au traitement médical.

  • l'échographie permet d'étudier la structure du tendon (épaississement, désorganisation, rupture partielle ou complète), l'état de l'enthèse, l'existence d'une bursopathie associée ;
  • l'IRM est l'examen « goldstandard », essentiellement dans les situations devant faire discuter un traitement chirurgical.

1.2 - Bursopathies

Les bourses séreuses permettent de faciliter le glissement des structures les unes sur les autres. Dans l'appareil locomoteur, les bourses permettent une interface entre l'os et un tendon, un muscle ou même la peau. Elles peuvent être le siège d'une pathologie mécanique, inflammatoire (microcristalline, rhumatisme inflammatoire) ou infectieuse. Toutes ces pathologies sont regroupées sous le terme de bursopathies ; les bursopathies superficielles (coude, genou) sont aussi dénommées « hygroma ».
Une bursopathie va se manifester par une douleur en regard de la bourse séreuse et un gonflement plus ou moins visible selon la localisation et son importance.
L'examen clinique s'efforcera d'éliminer des signes en faveur d'une cause infectieuse , qui fait la gravité de ces pathologies :

  • signes locaux inflammatoires (rougeur, chaleur) ;
  • signes généraux (fièvre, frissons) ;
  • adénopathies ;
  • évolution spontanée défavorable.

Des examens d'imagerie sont parfois nécessaires pour évaluer l'importance de la bursite et confirmer le diagnostic.
En cas de fièvre, une ponction de la bursite avec analyse cytobactériologique du liquide de ponction est indispensable pour rechercher un germe ; on y recherchera également des microcristaux en lumière polarisée.
La ponction d'une bursite superficielle (hygroma) devrait être évitée, sauf en cas de suspicion d'une cause septique, car il existe un risque théorique d'infecter la bourse en cas de ponction.
Le traitement des bursopathies est étiologique et dépend de leur cause mécanique, inflammatoire ou infectieuse.

2 - Lésions péri-articulaires et ligamentaires de l'épaule

2.1 - Rappels anatomiques et biomécaniques

Certains repères anatomiques sont importants pour bien comprendre la pathologie (fig. 30.1) :

  • l'espace sous-acromial est l'espace situé entre la tête humérale et la voûte sous-acromiale (acromion, articulation acromioclaviculaire et ligament acromiocoracoïdien) ;
  • la coiffe des rotateurs est composée des supra-épineux, infra-épineux, teres minor et subscapulaire ;
  • le tendon du chef long du biceps brachial chemine dans l'intervalle des rotateurs en position intra-articulaire. Il ne fait pas partie de la coiffe mais sa pathologie peut être associée à celle de la coiffe des rotateurs, notamment en cas de rupture de celle-ci ;
  • la bourse sous-acromiale, située entre les tendons et la voûte sous-acromiale, permet le glissement des structures les unes avec les autres. Elle est remplie de liquide synovial et pourra être le siège d'un épanchement satellite de la souffrance tendineuse ou d'une inflammation (bursite).


Fig. 30-1 :Schéma synthétique de l'épaule montrant l'espace sous-acromial et les tendons de la coiffe des rotateurs. La bourse sous-acromio-deltoïdienne située entre les tendons et la voûte sous-acromiale permet le glissement des structures.

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Certaines notions de biomécanique sont importantes pour bien comprendre la pathologie (fig. 30.2).

Fig. 30-2 :Biomécanique de l'épaule : évaluation de la mobilité de l'épaule dans les trois plans de l'espace.

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L'épaule est l'articulation la plus mobile du corps humain avec une mobilité possible dans les trois axes. Il s'agit en fait d'un complexe composé de trois articulations principales permettant les amplitudes complètes (glénohumérale, acromioclaviculaire, sternoclaviculaire) et deux espacements de glissement sous-acromial et scapulothoracique.
On définit les mobilités dans le plan sagittal (flexion et extension pour les mouvements du membre supérieur et/ou antépulsion et rétropulsion pour les mouvements du moignon de l'épaule), le plan frontal (abduction et adduction) et le plan transversal (rotation latérale et médiale).
En clinique, on préfère la mesure de l'élévation antérieure, qui se fait naturellement dans le plan de la scapula orientée à environ 30° vers l'avant, aux mesures de la flexion ou de l'abduction.

2.2 - Démarche clinique et paraclinique devant une douleur d'épaule

L'approche diagnostique d'une épaule douloureuse doit passer par un interrogatoire et un examen clinique rigoureux et structuré qui permettra dans la majorité des cas d'aboutir à une suspicion diagnostique forte et d'orienter vers une prise en charge adaptée ou la prescription d'examens complémentaires.

2.2.1 - Interrogatoire

  • Terrain : antécédents, activités professionnelles et de loisir, latéralisation du patient (droitier/gaucher), recherche d'un facteur favorisant.
  • Mode et date de survenue, facteur déclenchant : une survenue brutale fera évoquer une rupture de la coiffe des rotateurs en cas de traumatisme ou une résorption de calcification en cas d'apparition spontanée.
  • Localisation, irradiation : des douleurs d'épaules peuvent irradier dans le bras voire l'avant-bras ; une localisation postérieure est peu en faveur d'une affection de l'épaule notamment d'une atteinte de la coiffe des rotateurs.
  • Horaire mécanique ou inflammatoire, facteurs favorisants/améliorants : attention, même d'origine mécanique, les tendinopathies provoquent des réveils nocturnes ; l'aggravation des douleurs lors des mouvements au-dessus du plan de la scapula est également en faveur d'une pathologie de la coiffe des rotateurs.
  • Évolution dans le temps, efficacité des traitements.
  • Signes associés : fièvre, altération de l'état général, autres douleurs articulaires.

2.2.2 - Examen physique

L'examen clinique sera structuré en quatre phases :

  • l'inspection se fait sur un patient torse nu ; elle recherche des anomalies des téguments, des tuméfactions, une amyotrophie (vidéo 30.1) ;
  • la palpation examine les repères osseux et articulaires : articulation sternoclaviculaire, acromioclaviculaire, sillon deltopectoral (vidéo 30.2) ;
  • les mobilités seront réalisées de manière active et passive dans les trois plans de l'espace. L'étude de la rotation externe (latérale) active est un temps essentiel de l'examen clinique (vidéo 30.3). Cette manœuvre effectuée sur un patient assis permet de se renseigner sur la mobilité de l'articulation glénohumérale. Elle doit être comparative.

Les manœuvres sont résumées dans le tableau 30.1. On distingue les manœuvres recherchant un conflit sous-acromial et le testing des tendons de la coiffe des rotateurs. Attention, ces manœuvres ne sont pas du tout spécifiques prises de manière individuelle, c'est l'ensemble du tableau clinique qui permet de les interpréter (cf. fig. 30.5).
 
Tableau 30.1 : Manœuvres cliniques de l'épaule.

Nom de la manœuvrePosition de départDescription de la manœuvreCommentaires
Yocum
Le malade place sa main à plat sur l'épaule opposée saine, coude fléchi à 90°Le malade décolle son coude du thorax contre résistanceManœuvre très peu spécifique
Neer
L'examinateur bloque la scapula par un appui sur le moignon de l'épauleÉlévation passive du membre supérieur en rotation médiale et antépulsion dans l'axe de la scapulaManœuvre peu spécifique.
Hawkins
Rotation médiale avec l'épaule à 90° de flexion, avant-bras fléchi à 90°Rotation médiale passiveManœuvre peu spécifique
Jobe
Supra-épineux
(vidéo 30.4)
Bras à 90° d'élévation antérieure dans le plan scapulaire, rotation médiale (pouce tourné vers le sol)Abduction contre résistance 
Infra-épineux
(vidéo 30.5)
Bras coude au corps, avant-bras fléchi à 90°Rotation latérale contre résistanceLa position RE2 ou manœuvre de Patte (abduction de l'épaule à 90°) teste la force du teres minor
Gerber
Subscapulaire
(vidéo 30.6)
Rotation médiale main dans le dos, coude fléchi à 90°Décoller la main du dosCe test est peu spécifique car mettre la main dans le dos est douloureux quelle que soit la pathologie
Belly press test
Subscapulaire
(vidéo 30.7)
Rotation médiale main sur le ventre, coude fléchi à 90°Plaquer la main sur le ventre contre résistanceManœuvre à préférer pour le subscapulaire
Palm up test
Biceps Brachial
Bras à 90° d'antépulsion en rotation latéraleFlexion avant-bras sur le bras, épaule contre résistancePermet de palper le corps musculaire du biceps qui va bomber en cas de rupture du chef long (signe de Popeye)

 

2.2.3 - Examens complémentaires

La radiographie standard reste l'examen de référence et doit être faite de manière systématique avant la réalisation de tout autre examen complémentaire (échographie, IRM, arthroscanner).
Elle comporte de manière systématique une incidence de face et un faux profil de Lamy (ou profil de coiffe).
Elle peut être complétée en fonction de la pathologie par des clichés de face en rotation neutre, latérale et médiale (pathologie de la coiffe des rotateurs, recherche d'une calcification tendineuse) ou un cliché acromioclaviculaire.
La stratégie d'utilisation des examens complémentaires et leurs résultats en fonction des pathologies sont résumés dans le tableau 30.2.
 
Tableau 30.2 : Indications des examens complémentaires en fonction des pathologies et résultats.

CapsuliteRésorption de calcificationArthrite aiguëRupture de la coiffe des rotateursTendinopathie de la coiffe des rotateurs
Radiographie standard
Première intentionPremière intentionPremière intentionPremière intentionPremière intention
Résultats attendusNormalePrésence d'une calcification floueSignes indirects d'épanchements, chondrocalcinoseSignes indirects : ascension de la tête huméraleNormale
Échographie
Pas d'intérêtDeuxième intentionPremière intentionPremière intentionDeuxième intention
Résultats attendusBursite, calcification hétérogène au sein du tendonVisualisation d'un épanchement dans l'articulationConfirmation de la rupture de la coiffe : interruption des fibres tendineuses
Épanchement bursal associé
Épaississement des tendons, aspect hypoéchogène et désorganisé
Épanchement bursal associé
IRM
Rarement utile, uniquement en cas de doute diagnostiquePas d'intérêtDeuxième intentionDeuxième intention, si projet chirurgicalTroisième intention, sauf dans le cas de maladie professionnelle
Résultats attendusVisualisation d'un épanchement dans l'articulation
Œdème osseux sous-chondral, synovite

 

2.3 - Principales causes de douleurs péri-articulaires de l'épaule

Les principales causes sont classées en fonction du tableau clinique.

2.3.1 - Épaule aiguë hyperalgique

Ce tableau correspond à l'apparition brutale d'une douleur d'épaule avec impossibilité de mobilisation active ou passive.
Dans ce cas, l'examen clinique est limité ; on recherche à l'inspection une tuméfaction évocatrice d'une bursite ou d'une arthrite, des signes inflammatoires locaux. La palpation douce recherchera un point douloureux en n'oubliant pas la palpation des articulations acromioclaviculaire et sternoclaviculaire.
Les deux étiologies à évoquer en priorité sont une résorption aiguë de calcification de la coiffe des rotateurs ou une arthrite aiguë (infectieuse ou microcristalline principalement).

Résorption de calcification

  • Le terrain est le plus souvent celui d'une femme de 30 à 50 ans. Le début est généralement très brutal. L'examen clinique est quasiment impossible, toute mobilisation active ou passive de l'épaule étant très douloureuse. Une fièvre modérée est possible, de même que l'existence d'un syndrome inflammatoire biologique avec polynucléose.
  • L'examen radiographique des épaules retrouve les calcifications (fig. 30.3). Lors d'une crise hyperalgique, la calcification devient souvent hétérogène, mal limitée et elle peut migrer plus ou moins complètement dans la bourse sous-acromio-deltoïdienne.


Fig. 30-3 : Aspect de résorption aiguë de calcification d'épaule : aspect flou et fragmenté de la calcification avec passage de calcium dans la bourse sous-acromio-deltoïdienne.

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  • Le diagnostic repose sur la clinique associée à une radiographie évocatrice. Une échographie peut être demandée en complément et mettre en évidence une bursite associée à un aspect hétérogène de la calcification associé de manière habituelle à un signe doppler péricalcique.
  • Le traitement comporte la prescription d'un glaçage, d'antalgiques et d'anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ; l'injection de corticoïdes dans la bourse est en général très efficace en cas de résistance au traitement de première intention.

Arthrite aiguë

  • Une arthrite aiguë glénohumérale, acromioclaviculaire ou sternoclaviculaire peut se manifester sous la forme d'une épaule aiguë hyperalgique.
  • Les causes sont infectieuses, microcristallines ou inflammatoires. L'inspection et la palpation recherchent un épanchement articulaire qui peut être difficile à mettre en évidence quand il est glénohuméral.
  • La radiographie standard reste indispensable dans ce contexte pour évoquer les diagnostics différentiels (tendinopathie calcifiante) et étiologiques (dépôts de microcristaux ; fig. 30.4). La présence d'un épanchement n'est généralement pas visible sur les radiographies standards.


Fig. 30-4 : Dépôts de cristaux à la surface du cartilage de la tête humérale caractéristique de chondrocalcinose.

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  • L'échographie permet de confirmer le diagnostic d'épanchement et de guider la ponction.
  • Les diagnostics différentiels des épaules aiguës hyperalgiques sont le syndrome de Parsonage-Turner en rapport avec un plexite et les névralgies cervico-brachiales. Dans ce cas, la mobilisation douce de l'épaule reste possible en passif car les structures articulaires et péri-articulaires ne sont pas pathologiques.

2.3.2 - Épaule douloureuse chronique

La démarche diagnostique face à une épaule douloureuse chronique est résumée infra dans la figure 30.6. Le premier temps sera l'évaluation des mobilités actives et passives de l'épaule à la recherche d'une capsulite rétractile. Ensuite, l'examen recherchera des arguments pour une tendinopathie ou une rupture de la coiffe des rotateurs.

Limitation des amplitudes actives et passives : capsulite rétractile

La présence d'une limitation active et passive des amplitudes articulaires dans un contexte de douleurs chroniques va faire évoquer une atteinte capsulaire ou en diagnostic différentiel une arthropathie glénohumérale.

Capsulite rétractile

  • Le diagnostic de capsulite repose sur la clinique et la normalité de la radiographie standard. Il s'agit d'une rétraction capsulaire de l'épaule.
  • Elle peut être primitive ou secondaire à un épisode douloureux de la région scapulaire (tendinopathie aiguë ou chronique, un traumatisme…). Elle est considérée comme faisant partie du grand cadre des syndromes douloureux régionaux complexes (anciennement algoneurodystrophies) (cf. chapitre 20).
  • Le diagnostic est suspecté par l'examen clinique retrouvant une limitation passive de l'articulation particulièrement en RE1 (rotation externe en position 1) souvent nulle. L'élévation antérieure dépasse difficilement le plan horizontal des épaules (90°), la RI (rotation interne) est classiquement à main-fesse. Il existe également un glissement précoce de la scapula sur le gril thoracique survenant avant 90° d'élévation. Ce signe est important dans la phase de début ou l'évaluation des autres amplitudes est difficile du fait des douleurs.
  • L'interligne articulaire glénohumérale est normal sur les clichés radiographiques, faisant ainsi la différence avec une arthrose de l'épaule.
  • L'échographie n'a pas d'intérêt et l'IRM est à réserver en cas de doute diagnostique.
  • Son traitement repose essentiellement sur la rééducation et les infiltrations intra-articulaires de corticoïdes qui présentent un effet antalgique. Certains proposent des capsulodistensions de l'épaule et mobilisation sous anesthésie et suivie immédiatement par une rééducation plus intense pour gagner plus rapidement en amplitude articulaire. L'évaluation est lente mais favorable en 18 à 24 mois.

Omarthrose

L'omarthrose est le diagnostic différentiel de la capsulite. La plupart du temps elle est secondaire à une rupture de la coiffe des rotateurs avec ascension de la tête humérale (omarthrose dite excentrée dans le plan frontal).
On note des signes radiographiques d'arthrose associant pincement articulaire, condensation, ostéophytose qui peuvent cependant être tardifs (fig. 30.5).

Fig. 30-5 :Aspect d'omarthrose excentrée associant pincement articulaire localisé, condensation, ostéophytose de la partie inférieure de la tête humérale, disparition de l'espace sous-acromial.

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L'omarthrose primitive dite centrée dans le plan frontal est plus rare et correspond à une véritable atteinte arthrosique de l'articulation glénohumérale avec pincement de l'interligne, condensation sous-chondrale et ostéophytose le plus souvent polaire inférieure avec notamment ostéophyte huméral inférieur en « goutte » ; elle peut être primitive ou survenir après des lésions cartilagineuses glénohumérales secondaires à une atteinte inflammatoire (polyarthrite rhumatoïde), infectieuse (arthrite septique) ou microcristalline (chondrocalcinose).

Tendinopathie et rupture de la coiffe des rotateurs

Tendinopathie

  • Le tableau clinique correspond à un patient présentant une douleur chronique, sans limitation des amplitudes articulaires (ou minime, liée à la douleur), sans déficit moteur (ou minime, antalgique), avec des manœuvres de mise en tension des tendons de la coiffe des rotateurs douloureuses (cf. tableau 30.1).
  • Il sera important de rechercher des facteurs favorisants extrinsèques (microtraumatismes : mouvements répétitifs : métier, sport) et intrinsèques (réduction de l'espace sous-acromial, morphologie de l'acromion selon Park, arthrose acromioclaviculaire, acromion long).
  • La radiographie standard, indiquée en première intention (face trois rotations et profil de Lamy) :
    – élimine des diagnostics différentiels ;
    – permet de visualiser les calcifications abarticulaires conduisant au diagnostic de tendinopathie calcifiante.
  • L'échographie ne peut remplacer la radiographie standard. Elle est indiquée en cas de doute clinique sur une rupture de la coiffe des rotateurs et en cas de résistance au traitement de première intention.
  • Le traitement de première intention comporte la correction des facteurs favorisants, les AINS et la kinésithérapie. Une infiltration de dérivés cortisoniques dans la bourse sous-acromio-deltoïdienne peut être proposée en cas d'échec ou lorsqu'une bursite est mise en évidence sur les examens complémentaires.

Rupture de la coiffe des rotateurs

  • Un déficit moteur au testing d'un des muscles de la coiffe des rotateurs contre résistance fait suspecter une rupture tendineuse . Il est important de noter que ce signe est parfois difficile à interpréter, le déficit étant parfois uniquement en rapport avec la douleur dans des tendinopathies très douloureuses. De plus, il peut ne pas y avoir de déficit retrouvé dans les ruptures progressives et chroniques, par compensation des autres muscles de la région.
  • Le tendon le plus souvent atteint est le supra-épineux. Le patient ne peut alors résister à la pression exercée lors du test de Jobe.
  • Le tableau d'épaule dite « pseudoparalytique » correspondant à une rupture massive et aiguë de la coiffe est exceptionnel.
  • Les radiographies ne montrent que des signes indirects souvent tardifs de rupture de coiffe : diminution de la hauteur sous-acromiale avec ascension de la tête humérale, rupture du cintre glénohuméral.
  • L'échographie est l'examen à réaliser pour confirmer la rupture si l'examen clinique n'est pas suffisant.
  • La prise en charge dépend de l'âge du patient. La première phase du traitement est toujours la rééducation quel que soit l'âge. On privilégiera un traitement chirurgical chez les patients jeunes. Dans les autres cas, les plus fréquents, une indication de réparation chirurgicale de la coiffe ne se discutera qu'en cas d'échec du traitement médical et rééducatif d'une coiffe ayant une trophicité musculaire satisfaisante, sans infiltration graisseuse musculaire significative en IRM et si l'état physiologique et le niveau d'activité du patient justifient l'intervention.
  • L' IRM ne sera demandée qu'en cas d'échec du traitement médical et lorsqu'une réparation chirurgicale de la coiffe est discutée.

Douleur d'origine acromioclaviculaire ou sternoclaviculaire

Les articulations acromioclaviculaire et sternoclaviculaire ne doivent pas être oubliées dans l'examen clinique d'une épaule douloureuse chronique .
En effet, elles peuvent être elle-même à l'origine des douleurs ou leur atteinte associée à une pathologie de la coiffe des rotateurs.
Le premier temps de l'examen sera la palpation de l'articulation qui, si elle est douloureuse, doit être complétée par des manœuvres complémentaires, notamment pour l'acromioclaviculaire le cross arm test mettant le membre supérieur en flexion à 90° et réalisant une adduction de l'épaule permettant de mettre l'articulation en compression (vidéo 30.8).

2.4 - Synthèse de la conduite à tenir

L'arbre diagnostique en figure 30.6 synthétise la conduite à tenir face à une épaule douloureuse.

Fig. 30-6 :Synthèse de la conduite à tenir devant une épaule douloureuse chronique.

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3 - Lésions péri-articulaires et ligamentaires du genou

3.1 - Rappels anatomiques

Le genou est une articulation diarthrodiale comportant en fait trois compartiments ayant la même cavité articulaire : articulations fémorotibiales médiale et latérale et fémoropatellaire. De nombreux éléments concourent à sa stabilité : capsule, ligaments et structures tendineuses. Sur le plan biomécanique, le genou est mobile dans le plan sagittal dans des mouvements de flexion et extension. Des mouvements de rotations sont également possibles mais évaluables uniquement genoux fléchis à 90°.
Cette section s'intéresse uniquement aux causes péri-articulaires de douleur du genou ; les causes articulaires sont traitées dans le chapitre 8 (arthrose) et les lésions traumatiques ligamentaires et méniscales aiguës sont traitées dans le référentiel d'orthopédie.

3.2 - Examen clinique et interrogatoire

img width=15 height=15 style="margin: 0 5px 0px 5px;" src="http://www.lecofer.org/photos/cours/imageB.jpg">L'examen clinique du genou et les différentes manœuvres citées sont visualisables sur le site du COFER en suivant les QRcodes.
L'examen clinique appréciera de manière systématique :

  • l'existence d'un épanchement articulaire : choc rotulien (vidéo 30.9) ;
  • des points douloureux à la palpation des principaux repères anatomiques (vidéo 30.10) ;
  • une instabilité du genou par des manœuvres ligamentaires : manœuvre de Lachman, tiroir antérieur et postérieur (vidéo 30.11) ;
  • une souffrance méniscale (manœuvre de Mac Murray, grinding test).

Une tendinopathie du genou sera à rechercher par des manœuvres spécifiques pour chaque tendon selon la triade classique : douleurs à l'insertion du tendon, à la contraction contre résistance et à l'étirement du tendon (tableau 30.3).
Tableau 30.3 : Douleurs et examen clinique des principales tendinopathies du genou.

Tendinopathie quadricipitaleTendinopathie patellaireTendinopathie de la patte d'oieSyndrome de la bandelette iliotibiale
Localisation de la douleur (spontanée et à la palpation)
Pôle supérieur de la patellaPôle inférieur de la patellaFace antéro- médiale du genou, sous l'interligne articulaireFace latérale au niveau du condyle latéral du genou
Examen clinique
Douleur à l'extension de jambe contre résistance et en flexion passive de jambeDouleur à l'extension de jambe contre résistance et en flexion passive de jambeDouleur à la flexion et rotation médiale contrariée de la jambe et à l'extension et rotation latérale passiveTest de Noble : douleur à la mise en tension du tractus iliotibial à 30° de flexion
Test de Renne : mouvements de flexion et extension du genou en appui monopodal

 

3.3 - Principales causes de douleurs péri-articulaires du genou

3.3.1 - Tendinopathies du genou

Il existe trois grandes causes de tendinopathie du genou :

  • tendinopathie de l'appareil extenseur (tendon quadricipital et patellaire) ;
  • tendinopathie de la patte d'oie ;
  • tendinopathie du tenseur du fascia lata (ou syndrome de la bandelette iliotibiale).

Les signes cliniques associés à chaque tendinopathie sont résumés dans le tableau 30.3.
Le diagnostic de tendinopathie reste clinique. Les examens complémentaires seront à demander en seconde intention en cas de résistance au traitement ou d'atypie. Une radiographie standard du genou face en charge et profil sera réalisée en première intention, complétée par une échographie. L'IRM ne sera demandée qu'en troisième intention.

3.3.2 - Douleurs méniscales

Hors contexte traumatique aigu (cf. référentiel d'orthopédie), les ménisques peuvent être la cause de douleurs chroniques du genou. Ceux-ci sont parfois le siège de lésions dégénératives (fissurations). Les arguments d'interrogatoire et d'examen clinique en faveur de l'origine méniscale d'une douleur chronique de genou sont :

  • antécédents traumatiques ou apparition suite à une position accroupie prolongée ;
  • douleur localisée sur l'interligne articulaire médial ou latéral ;
  • épisodes de blocages associés à des épanchements articulaires (hydarthrose) ;
  • sensation de dérangements internes ou de corps étrangers ;
  • manœuvres cliniques de compressions méniscales positives (grinding test, Mac Murray, cri méniscal).

Le diagnostic formel de l'origine méniscale de la douleur est souvent difficile, surtout lorsqu'il existe déjà des lésions d'arthrose fémorotibiale associée.
img width=15 height=15 style="margin: 0 5px 0px 5px;" src="http://www.lecofer.org/photos/cours/imageB.jpg">Une radiographie du genou de face en charge (précision indispensable dans la prescription), face en schuss, profil, permettra de recherche une arthrose fémorotibiale sur le compartiment douloureux. Une incidence en vue axiale du défilé fémoropatellaire permet de rechercher une arthrose associée de ce compartiment. Les clichés en schuss permettent de détecter plus précocement le pincement articulaire (cf. chapitre 8). Une IRM sera l'examen à réaliser en cas de doute diagnostique ou de résistance à la prise en charge conventionnelle. Attention, une IRM est inutile en cas d'arthrose radiographique car cela ne modifiera pas la prise en charge du patient. En effet, les chirurgies de ménisques sont inefficaces chez les patients porteurs de gonarthrose associée.

3.3.3 - Bursopathies

Le genou comprend des bourses de glissement, notamment entre les structures osseuses et la peau, permettant d'éviter les frictions mécaniques. La figure 30.7 montre les différentes bourses superficielles du genou. Une bursite superficielle (parfois appelée hygroma) correspond à une inflammation de cette bourse.

Fig. 30-7 :img width=15 height=15 style="margin: 0 5px 0px 5px;" src="http://www.lecofer.org/photos/cours/imageB.jpg">Bourses de la face antérieure du genou.

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Les signes cliniques à rechercher en faveur d'une bursite sont les suivants :

  • tuméfaction sous-cutanée superficielle rénitente (résistance élastique) ;
  • rougeur et augmentation de la chaleur localisée ;
  • absence d'épanchement intra-articulaire ;
  • mobilité douce de l'articulation conservée et indolore.

Les causes de bursites peuvent être inflammatoires (infectieuse, microcristalline, rhumatismes inflammatoires) ou mécanique (frottements répétés). Il est rappelé que la ponction d'une bursite superficielle (hygroma) devrait être évitée sauf en cas de suspicion d'une cause septique, car il existe un risque théorique d'infecter la bourse voire l'articulation en cas de ponction.

4 - Lésions péri-articulaires et ligamentaires de la cheville

Les entorses et autres traumatismes de la cheville sont traités dans le référentiel d'orthopédie.
La pathologie péri-articulaire de cheville est dominée par les douleurs postérieures, pouvant orienter vers une tendinopathie ou une enthésopathie achilléenne, une bursite ou une aponévrosite plantaire.

4.1 - Rappels anatomiques

Le système suro-achilléo-plantaire (fig. 30.8) est un système puissant permettant la propulsion du pied lors de la marche et de la course à pied. Il est composé du muscle triceps sural, du tendon calcanéen (ou d'Achille), de la tubérosité postérieure du calcanéus et de l'aponévrose plantaire. Ce système, très sollicité, est sujet à de nombreuses pathologies essentiellement mécaniques.

Fig. 30-8 :Système suro-achilléo-plantaire.
Système puissant permettant la propulsion du pied lors de la marche et de la course à pied. Il comprend le muscle triceps sural, le tendon calcanéen (ou d'Achille), la tubérosité postérieure du calcanéus et l'aponévrose plantaire.

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4.2 - Principales causes de douleurs de la face postérieure et inférieure de cheville

4.2.1 - Tendinopathie d'Achille (calcanéenne)

  • img width=15 height=15 style="margin: 0 5px 0px 5px;" src="http://www.lecofer.org/photos/cours/imageB.jpg">C'est la plus fréquente des tendinopathies de la cheville, particulièrement observée chez les coureurs de fond.
  • Elle se traduit par :
  • des douleurs postérieures de cheville, dans le corps du tendon ;
  • la palpation d’un épaississement dans le corps du tendon (fig. 30.9) en cas d’atteinte chronique (vidéo 30.12) ;

Fig. 30-9 :Tendinopathie achilléenne gauche se traduisant par un épaississement focal du tendon calcanéen.

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  • des douleurs à l'étirement passif du tendon lors de la dorsiflexion de la cheville ;
  • des douleurs à la contraction contre résistance du triceps sural.
  • Le diagnostic différentiel avec une rupture se fait par le test de Thompson : la pression du mollet n’entraîne plus la flexion plantaire de la cheville (vidéo 30.13).
  • Le diagnostic est clinique mais peut être confirmé par une échographie qui appréciera le type de tendinopathie et éliminera une rupture du tendon. Le traitement repose sur le repos articulaire, la prescription d'orthèses plantaires pour soulager le complexe suro-achilléo-plantaire et soutenir la voûte plantaire, notamment en cas de pieds creux associés, la kinésithérapie (étirements et renforcements du triceps sural) et des techniques physiothérapiques.

4.2.2 - Enthésopathie achilléenne

L'atteinte de l'insertion distale du tendon calcanéen au niveau de son attachement dans l'os (enthèse) est appelée enthésopathie. Elle est caractérisée cliniquement par une douleur distale à l'insertion du tendon sur l'os et non au niveau du corps tendineux. Elle doit faire évoquer une cause inflammatoire (spondyloarthrite, fig. 30.10) surtout quand il existe des érosions associées. Elle peut également être de cause mécanique.

Fig. 30-10 :Échographie du tendon calcanéen (d'Achille) : enthésite dans le cadre d'une spondyloarthrite.

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4.2.3 - Bursopathie rétrocalcanéenne (ou pré-achilléenne)

La bourse rétrocalcanéenne ou pré-achilléenne (entre le calcanéus et l'insertion du tendon calcanéen) peut être le siège d'une pathologie mécanique en cas de conflit avec le coin postéro-supérieur du calcanéus (maladie de Haglund, fig. 30.11), mais doit aussi faire rechercher une pathologie inflammatoire, notamment une spondyloarthrite.

Fig. 30-11 :Exemple d'hypertrophie de la partie postérieure du calcanéus caractéristique d'une maladie de Haglund.

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Le diagnostic est évoqué cliniquement par des douleurs très précises à la partie supérieure du calcanéus et à l'imagerie par des radiographies de cheville de profil pour évaluer la forme du calcanéus et rechercher des érosions à l'insertion du tendon calcanéen signant une atteinte inflammatoire.
L'échographie et l'IRM retrouveront un épanchement inflammatoire dans la bourse. En dehors du traitement de la cause, une infiltration radio- ou échoguidée dans la bourse permet d'améliorer la symptomatologie.

4.2.4 - Fasciite plantaire

Il s'agit d'une atteinte de l'insertion de l'aponévrose plantaire sur la face inférieure du calcanéus. Les signes cliniques évocateurs sont :

  • des douleurs plantaires à la marche ou en position debout prolongée ;
  • un dérouillage matinal court de quelques minutes puis une aggravation à l'effort ;
  • une douleur précise à la palpation de l'insertion de l'aponévrose à la partie antéromédiale de l'appui talonnier.

La clinique est suffisante pour affirmer le diagnostic qui comporte une correction des facteurs favorisants : surpoids, sport, troubles statiques, le port de semelles et la rééducation (massages transverses profonds, étirement de l'aponévrose plantaire et de l'ensemble de la chaîne suro-achilléo-plantaire). Une radiographie et une échographie pourront être réalisées en deuxième intention. Une infiltration de dérivés cortisonés à la surface de l'insertion de l'aponévrose, des techniques de physiothérapie peuvent être proposées en deuxième intention.




Légende :

Dans le respect de la Réforme du deuxième cycle des études médicales (R2C), les connaissances rassemblées sur ce site sont hiérarchisées en rang A, rang B et rang C à l'aide de balises et d'un code couleur :
Connaissances fondamentales que tout étudiant doit connaître en fin de deuxième cycle.
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