Arthrose

Item 129 UE VI


 

1 - Pour comprendre

  • L'arthrose est une maladie ostéoarticulaire très fréquente touchant environ 10 % de la population.
  • Elle affecte principalement le rachis, les genoux, les hanches et les mains.
  • L'arthrose affecte en premier lieu le cartilage articulaire, mais aussi la membrane synoviale et l'os sous-chondral.
  • Lorsque l'arthrose devient symptomatique, elle entraîne des douleurs et une gêne fonctionnelle.
  • Sa forte prévalence et son retentissement sont à l'origine d'un coût médico-économique considérable.
  • Du fait de la sédentarité qu'elle occasionne, une surmortalité cardiovasculaire est observée chez les patients gonarthrosiques.

1.1 - Physiopathologie

L'arthrose est une maladie de l'ensemble de l'articulation synoviale.
Une articulation synoviale est composée principalement de quatre tissus :

  • le cartilage articulaire, qui est un tissu particulier puisqu'il n'est ni vascularisé, ni innervé et qu'il comprend un seul type de cellules : les chondrocytes. Sa matrice est composée à plus de 80 % d'eau et d'un réseau de collagène et de protéoglycanes, fortement hydrophiles, à l'origine des propriétés biomécaniques du cartilage articulaire dont le rôle principal est d'absorber les contraintes mécaniques entre deux surfaces osseuses ;
  • l'os sous-chondral, qui est la plaque d'os intra-articulaire sur lequel repose le cartilage. Ses interactions avec le cartilage sont importantes et permettent le passage de nutriments de l'os vers le cartilage notamment ;
  • la membrane synoviale, tissu conjonctif lâche qui sécrète le liquide synovial, lubrifiant de l'articulation, normalement présent en très faible quantité ;
  • la capsule qui entoure l'ensemble de l'articulation.

Au cours de l'arthrose, sous l'effet de différents stress (mécanique, inflammatoire, métabolique), l'ensemble de ces tissus va subir des modifications avec notamment :

  • la dégradation du cartilage par des enzymes protéolytiques capables de détruire les fibres de collagènes et de protéoglycanes ;
  • une inflammation de la membrane synoviale avec le recrutement de cellules immunitaires sous l'effet de débris cartilagineux ;
  • un remodelage de l'os sous-chondral conduisant aux géodes, sclérose sous-chondrales et au développement d'excroissances osseuses appelées ostéophytes.

L'arthrose est caractérisée par un excès de contrainte mécanique sur les articulations mais pas seulement : il existe aussi une augmentation de la production de médiateurs inflammatoires tels que les cytokines responsable d'une inflammation locale. Cette inflammation de bas grade va induire la production accrue d'enzymes protéolytiques telles que les métalloprotéases, capables de digérer la matrice extracellulaire du cartilage.
La douleur arthrosique est quant à elle un phénomène complexe puisque le cartilage n'est pas innervé. Sa physiopathologie fait donc intervenir l'os sous-chondral, la capsule articulaire mise en tension lors des épisodes d'épanchement, la membrane synoviale et des mécanismes complexes de sensibilisation centrale de la douleur.

1.2 - Facteurs de risque de l'arthrose

L'arthrose primitive est initiée sous l'influence de facteurs de risque qui se combinent à une susceptibilité propre du cartilage à développer une arthrose chez certains individus :

  • âge : rare avant 40 ans, l'incidence de l'arthrose augmente fortement après 60 ans ;
  • surpoids et surtout obésité : l'excès pondéral favorise l'arthrose des articulations portantes (genou, rachis et, dans une moindre mesure, hanche) ou non (arthrose digitale). Désormais on considère que le syndrome métabolique est, au-delà de la seule obésité, un facteur de risque d'arthrose (combinaison de l'hypertension artérielle, diabète de type 2 ou insulinorésistance, dyslipidémie et obésité) ;
  • hérédité : il existe des familles où la prévalence de l'arthrose est bien supérieure à celle de la population générale, ce qui est probablement lié à des facteurs génétiques de susceptibilité (polymorphismes génétiques). Cela concerne particulièrement l'arthrose digitale ;
  • sexe féminin : la prévalence de l'arthrose est plus importante chez les femmes que chez les hommes, surtout après la ménopause ;
  • excès de contraintes mécaniques : port de charges lourdes, microtraumatismes répétés, troubles de l'architecture des membres, congénitaux ou acquis augmentant les contraintes (genu varum ou genu valgum pour la gonarthrose, dysplasie pour la hanche), antécédent de lésions et/ou de chirurgie méniscoligamentaires (ligaments croisés et ménisques du genou) ou de fractures articulaires. Ces facteurs de risque ne correspondent pas à des arthropathies destructrices (qui, elles, sont responsables d'arthrose secondaire) mais favorisent l'arthrose.

Ainsi, on considère schématiquement qu'il existe trois grands phénotypes d'arthrose primitive qui regroupent la majorité des patients et qui peuvent se combiner chez un même patient :

  • arthrose liée au vieillissement ;
  • arthrose métabolique (associée à l'obésité ou au syndrome métabolique) ;
  • arthrose post-traumatique.

Par ailleurs, à côté de l'arthrose primitive, on distingue les arthroses dites secondaires qui surviennent sur des arthropathies destructrices préexistantes (principalement arthrites microcristallines, arthrites septiques, rhumatismes inflammatoires destructeurs tels que la polyarthrite rhumatoïde ou la spondyloarthrite).

2 - Coxarthrose

2.1 - Définition

La coxarthrose est l'arthrose de l'articulation coxofémorale.

2.2 - Épidémiologie

Entre 40 et 75 ans, la prévalence de la coxarthrose symptomatique en France est de l'ordre de 1 à 5 % de la population, avec une légère prédominance féminine. Dans 50 % des cas, elle est secondaire à un vice architectural de la hanche qu'il faudra systématiquement rechercher avec des radiographies (coxarthrose secondaire sur dysplasie).

2.3 - Diagnostic

Le diagnostic est radioclinique.

2.3.1 - Clinique

Cliniquement, le diagnostic est évoqué devant :

À l'interrogatoire

  • Terrain : âge > 40 ans, facteurs de risque (obésité, traumatisme articulaire…).
  • Douleur du pli de l'aine, pouvant irradier sur la face antérieure ou antéromédiale de cuisse mimant une cruralgie. Les douleurs peuvent être postérieures dans la fesse ou totalement « projetée » en regard du genou, ce qui peut être trompeur .
  • D'horaire mécanique : augmentée à l'effort, calmée par le repos et ne réveillant pas le malade la nuit (sauf aux changements de position), possibilité de dérouillage matinal possible mais < 15 minutes.
  • Raideur de hanche.
  • Retentissement fonctionnel : il faut évaluer la diminution des capacités fonctionnelles en lien avec l'atteinte de la coxofémorale. À l'interrogatoire, on recherchera une limitation du périmètre de marche, des difficultés à mettre des chaussettes, à enfiler un collant, à s'accroupir, à sortir de voiture, ou un retentissement sur la vie sexuelle.

Plusieurs indices algofonctionnels, sous forme de questionnaires comme l'indice WOMAC (Western Ontario and McMaster Universities index), le KOOS (Knee Injury and Osteoarthritis Outcome Score) ou l'indice de Lequesne, permettent de suivre l'évolution du retentissement de la coxarthrose.
Avec l'indice de Lequesne (tableau 8.1) est même proposé un seuil (≥ 10–12) incitant à discuter l'indication de prothèse totale de hanche.
Tableau 8.1. :
Indice fonctionnel des coxopathies de Lequesne (à titre indicatif).

ÉvaluationCotation
Douleur ou gêne :
Douleur nocturne
Aucune0
Seulement aux mouvements et dans certaines postures1
Même immobile, sans bouger2
Dérouillage matinalAucun ou inférieur à une minute0
Pendant quelques minutes1
Plus d'un quart d'heure2
Douleur lors du stationnement debout ou du piétinement pendant une demi-heureAucune0
Des douleurs1
À la marcheAucune0
Après quelque distance1
Dès les premiers pas et allant croissant2
Gêne lors de la station assise prolongéeAucune0
Douleur1
Marche maximale :
Aucune limitation
Plus de 1 km mais limitée
Environ 1 km (environ 15 minutes)
500 à 900 mètres (environ 8 à 15 minutes)
300 à 500 mètres
100 à 300 mètres
Moins de 100 mètres
Avec une canne ou canne-béquille⁎
Avec deux cannes ou cannes-béquilles⁎
0
1
2
3
4
5
6
 + 1
 + 2
Difficultés pour :
Enfiler une chaussette ou un collant par devant
Ramasser un objet à terre
Monter et descendre un étage
Sortir d'une voiture
Retentissement sur l'activité sexuelle
0 à 2⁎⁎
0 à 2
0 à 2
0 à 2
0 à 2
Le domaine chirurgical commence lorsque le score est supérieur ou égal à 10–12 points.
 
⁎ L'utilisation de 1 ou 2 cannes-béquilles majore le score obtenu.
⁎⁎ Cotation : 0 : sans difficulté ; 0,5 : assez facilement ; 1 : avec difficulté ; 1,5 : avec beaucoup de difficulté ; 2 : impossible.
(Source : Lequesne M, Mery C, Samson M, Gérard P. Indexes of severity for osteoarthritis of the hip and knee. Scand J Rheumatol 1987 ;65:85-9.)

À l'examen clinique

Il doit être bilatéral et comparatif, se faire debout, à la marche puis en position couchée.

  • Inspection : recherche d'une boiterie d'esquive, d'un flessum de hanche (impossibilité d'extension complète de hanche) ou d'une attitude vicieuse en rotation latérale, d'une amyotrophie des muscles de la loge antérieure de cuisse (psoas, quadriceps).
  • Palpation et mobilisation :
    – douleur et/ou limitation douloureuse lors de la mobilisation de la hanche ; au début, les mouvements sont peu limités et la limitation concerne principalement la rotation médiale et l'extension ;
    – palpation et mobilisation des genoux à la recherche d'une gonarthrose associée ;
    – absence de syndrome rachidien, signe de Léri négatif (si doute sur une cruralgie).

Au total, au terme de l'examen, on doit pouvoir affirmer la responsabilité de la hanche dans le syndrome douloureux.

2.3.2 - Imagerie

Les radiographies vont aider à confirmer le diagnostic évoqué cliniquement.
L'examen radiographique (fig. 8.1 et 8.2) comprend un cliché de bassin debout de face et un faux profil de Lequesne de chaque hanche — indispensable, il évalue l'interligne articulaire en avant et en arrière ; l'interligne articulaire normal croît d'arrière en avant.

Fig. 8-1 : Coxométrie.
A. Hanche de face. B. Faux profil de Lequesne.
Angle VCE : couverture externe de la tête (N > 25°). Angle HTE : obliquité du toit du cotyle (N < 10°). Angle CC'D : céphalo-cervico-diaphysaire (N < 135°). Angle VCA : couverture antérieure de la tête (N > 25°). V : verticale. H : horizontale. C : centre de la tête fémorale. D : axe de la diaphyse fémorale. E : point externe du toit du cotyle. T : point interne du toit du cotyle. A : point antérieur du toit du cotyle.

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Fig. 8-2 :Coxarthrose.

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Fait important, il peut exister une dissociation anatomoclinique : l'importance de l'atteinte radiologique n'est pas toujours corrélée à la douleur et/ou au retentissement fonctionnel.
L'IRM de hanche n'a pas d'intérêt en présence d'une coxarthrose typique. Cet examen sera discuté en cas de doute avec certains diagnostics différentiels (ostéonécrose, fissure, algodystrophie) (cf. infra).
Face à une coxarthrose typique, l'arthroscanner de hanche ne présente pas d'utilité. Cet examen est parfois utilisé pour rechercher une atteinte cartilagineuse coxofémorale sans signes d'arthrose à la radiographie ou une ostéochondromatose secondaire à la coxarthrose.
La radiographie permet de détecter des formes liées à un vice architectural (dysplasie) grâce à la coxométrie qui évalue les angles de couverture du cotyle et l'obliquité du col fémoral sur le cliché de face.
Il existe quatre signes cardinaux de l'arthrose (fig. 8.3), qui ne sont pas forcément tous présents :

  • le pincement localisé de l'interligne articulaire apprécié de façon comparative. Sur la face, il est le plus souvent supérolatéral, plus rarement supérieur global ou supéromédial. L'interligne sur le cliché de face peut être normal dans les formes débutantes, d'où l'intérêt du cliché de profil ;
  • l'ostéophytose marginale : avant-toit, péricéphalique, périfovéale, céphalique postéro-inférieure, « en hamac » sous le col fémoral ; c'est un signe spécifique de l'arthrose ;
  • l'ostéosclérose condensante de l'os sous-chondral dans les zones d'hyperpression, le pôle supérieur de la tête et/ou le toit du cotyle ;
  • des géodes sous forme de lacunes cerclées en regard du pincement maximal de l'interligne articulaire (zone d'hyperpression).


Fig. 8-3 :Coxarthrose polaire supérieure.
A. Pincement articulaire supérolatérale. B. Ostéocondensation sous-chondrale. C. Géodes sous-chondrales. D. Ostéophytose : 1. cotyloïdienne ; 2. péricapitale ; 3. cervicale inférieure ; 4. sous-capitale ; 5. de l'arrière-fond du cotyle ; 6. périfovéale.

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Dans les formes plus évoluées, on observe une perte de sphéricité de la tête fémorale.

2.3.3 - Biologie

Aucun examen biologique n'est nécessaire au diagnostic. Il n'y a pas de syndrome inflammatoire au cours de l'arthrose (CRP, VS normales).
L'examen du liquide synovial est inutile dans une coxarthrose typique cliniquement et radiographiquement. En cas de doute diagnostique, l'analyse du liquide articulaire confirme son caractère « mécanique » et l'absence de microcristaux.
Il n'y a pas de test de routine permettant d'évaluer la dégradation du cartilage.

2.3.4 - Diagnostic différentiel

  • Une cruralgie (mais douleurs neurogènes, diminution ou abolition d'un réflexe rotulien, hypoesthésie de la face antérieure de cuisse).
  • Une ostéonécrose aseptique de la tête fémorale (rechercher des facteurs de risque tels que l'alcool ou la corticothérapie).
  • Une tendinopathie du moyen fessier (douleur latérale, en regard du grand trochanter).
  • Une fissure ostéoporotique du bassin (sacrum ou branche).
  • Un syndrome douloureux régional complexe de hanche (surtout au troisième trimestre de grossesse).

2.4 - Pronostic

Il existe des grandes variations interindividuelles dans la cinétique d'évolution clinique et/ou radiographique : la progression moyenne du pincement articulaire à la hanche est de 0,2 à 0,3 mm par an. Certaines formes de coxarthrose n'évoluent pas (moins de 10 %) ou peu (surtout les formes supéromédiales). À l'inverse, il existe des épisodes de chondrolyse semi-rapide, voire de chondrolyse rapide, correspondant à la coxarthrose destructrice rapide (CDR).

2.5 - Formes cliniques

2.5.1 - Coxarthrose destructrice rapide (CDR)

La CDR se définit par un pincement de plus de 50 % de l'interligne ou de 2 mm en l'espace d'un an. Elle est caractérisée par une douleur de début brutal, très intense, à recrudescence nocturne.
La coxarthrose rapidement destructrice évolue très rapidement vers un pincement global de l'interligne sans ostéophytose. Seule la répétition des clichés (à 3 mois d'intervalle minimum) met en évidence la chondrolyse par l'étude du pincement articulaire. L'évolution peut se faire vers l'ostéolyse de la tête fémorale qui perd alors sa sphéricité. Le doute avec une coxite notamment infectieuse ou microcristalline impose la ponction articulaire pour analyser le liquide synovial.

2.5.2 - Coxarthroses liées à une anomalie d'architecture

Différentes pathologies congénitales telles que la dysplasie luxante (fig. 8.4) ou la dysplasie interne (fig. 8.5) ou acquises au cours de la croissance sont responsables de vices architecturaux qui vont faire le lit d'une coxarthrose à l'âge adulte lorsqu'elles ne sont pas dépistées et prises en charge. Elles sont détectées à la radiographie standard par la coxométrie.

Fig. 8-4 :Coxarthrose liée à une dysplasie supéro-externe.

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Fig. 8-5 :Coxarthrose liée à une dysplasie interne.

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Coxarthroses secondaires à une autre pathologie de hanche

  • Fractures du cotyle ou du toit cotyloïdien.
  • Ostéonécroses de la tête fémorale à un stade évolué.
  • Coxites évoluées secondaires à toute maladie articulaire destructrice (principalement : spondyloarthrite, polyarthrite rhumatoïde, arthrite microcristalline, arthrite septique).
  • Maladie de Paget (coxopathie pagétique).
  • Inégalité des membres inférieurs lorsqu'elle dépasse 3 cm.

2.6 - Traitement

2.6.1 - Traitement médical

Le traitement médical est pluridisciplinaire.
Il combine systématiquement traitement pharmacologique et traitement non pharmacologique et vise à contrôler la douleur et limiter le retentissement fonctionnel.
Le traitement médical prendra en compte le nombre d'articulations arthrosiques symptomatiques — s'agit-il d'une coxarthrose isolée incitant aux traitements locaux ? ou s'agit-il d'une coxarthrose dans le cadre d'une polyarthrose ? — ainsi que la présence de comorbidités qui peuvent limiter certaines prescriptions médicamenteuses (par exemple, AINS per os).
Le traitement médical est résumé tableau 8.2.
 
Tableau 8.2 : Traitement médical de la coxarthrose.

Mesures non pharmacologiquesMesures pharmacologiques

  • Éducation du patient avec mesures de ménagement articulaire :
    – éviter les marches dans les périodes les plus douloureuses
    – promouvoir l'activité physique (marche, vélo, piscine) en dehors des poussées
    – éviter les stations debout prolongées, le port de charges lourdes
  • Perte de poids si surpoids ou obésité
  • Port de canne controlatérale notamment lors des poussées
  • Rééducation douce de la hanche, possiblement en balnéothérapie (pour préserver la mobilité articulaire, la trophicité musculaire et éviter la constitution d'un flessum)
  • Cure thermale : notamment en cas de coxarthrose dans un contexte de polyarthrose ou en cas de comorbidités limitant les prescriptions médicamenteuses ; a souvent un effet à la fois antalgique et psychologique

 

  • Antalgique simple de palier I à la demande en fonction de la douleur et non en systématique (paracétamol jusqu'à 3 g par jour)
  • AINS per os en cure courte en l'absence de contre-indication, à la posologie efficace la plus faible possible pour la durée la plus courte ; prendre en compte les comorbidités et contre-indication (notamment : maladies cardiovasculaires, antécédent d'ulcère gastroduodénal, insuffisance rénale, maladie hépatique)
  • Antalgiques de palier II (codéine, tramadol) et exceptionnellement de palier III (morphine) selon les comorbidités et la tolérance
  • Infiltration intra-articulaire de corticoïdes, en cas d'échec du traitement médicamenteux bien conduit

 


 
Les antiarthrosiques d'action lente et les injections d'acide hyaluronique ont été utilisés dans la coxarthrose, sans preuve réelle de leur efficacité symptomatique.
L'efficacité du traitement pourra être évaluée sur :

  • périmètre de marche  ;
  • douleur à la marche, mesurée par exemple sur une EVA ;
  • indices algofonctionnels (Lequesne, WOMAC) ;
  • indices de qualité de vie.

La tolérance devra être évaluée (particulièrement celle des AINS per os et des opioïdes).
Le renouvellement des traitements, particulièrement pharmacologiques, sera à discuter en fonction de leur efficacité et de leur tolérance.

2.6.2 - Traitement chirurgical

Chirurgie de la prothèse totale de hanche (fig. 8.6)

  • Indication : coxarthrose symptomatique avec retentissement clinique important (douleur et handicap) malgré un traitement médical bien conduit. L'imagerie seule ne permet pas de porter l'indication de la mise en place d'une prothèse de hanche car le degré de l'atteinte radiographique est imparfaitement corrélé aux symptômes. On pourra s'aider de l'indice de Lequesne (seuil retenu ≥ 10–12).
  • Durée de vie de la PTH : environ 20 ans.
  • Objectifs : efficacité antalgique et récupération fonctionnelle.
  • Suites opératoires : simple, le plus souvent avec reprise de la marche dès J1.
  • Expliquer au patient les complications aiguës et tardives possibles :
    – complications aiguës postopératoires : hématome, phlébite, arthrite septique précoce, retard de cicatrisation devant faire rechercher une infection ;
    – complications tardives :
       . la luxation de prothèse (il faudra à titre préventif éduquer les patients pour éviter les mouvements de flexion, rotation médiale et adduction excessifs) ;
       . le descellement prothétique précoce qui, par définition, survient durant la première année et devra faire rechercher une infection, ou tardif (descellement « mécanique » favorisé par l'usure du polyéthylène, complication la plus fréquente) ;
       . la détérioration cotyloïdienne ;
       . la fissure périprothétique ;
       . l'ossification périprothétique.


Fig. 8-6 :Prothèse totale de hanche à droite et coxarthrose à gauche.

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3 - Gonarthrose

3.1 - Définition

La gonarthrose est l'arthrose d'un des différents compartiments du genou : fémorotibial latéral (externe), fémorotibial médial (interne) et/ou fémoropatellaire.

3.2 - Épidémiologie

Il s'agit de la localisation la plus fréquente d'arthrose aux membres inférieurs, avec une nette prédominance féminine après la ménopause. Entre 40 et 75 ans, l'arthrose du genou touche 2 à 10 % des hommes et 3 à 15 % des femmes en France. Les différentes localisations (fémorotibiale latérale, fémorotibiale médiale ou fémoropatellaire) sont volontiers intriquées (15 à 20 % des cas), réalisant des atteintes uni-, bi- ou tricompartimentales. Il faudra préciser chez un patient gonarthrosique le ou les compartiments touchés.

3.3 - Gonarthrose fémorotibiale

3.3.1 - Diagnostic

Le diagnostic est radioclinique.

Clinique

Cliniquement, le diagnostic est évoqué devant :

À l'interrogatoire

  • Terrain : âge > 40 ans, facteurs de risque — obésité, troubles de la statique des membres inférieurs avec notamment un genu varum (entraînant une surcharge de pression dans le compartiment fémorotibial médial) ou un genu valgum (entraînant une surcharge de pression dans le compartiment fémorotibial latéral).
  • Douleur globale du genou, plus souvent localisée en médial en cas d'arthrose fémorotibiale médiale.
  • D'horaire mécanique : augmentée à l'effort, notamment dans les escaliers, calmée par le repos et ne réveillant pas le malade la nuit (sauf aux changements de position), avec un dérouillage matinal possible mais < 15 minutes.
  • Sensation de raideur, de craquements, de lâchage du genou.
  • Épisodes de blocage du genou qui peuvent évoquer des corps étrangers présents dans l'articulation (ostéochondrome) ou une lésion méniscale arthrosique.
  • Une augmentation de la douleur associée à un dérouillage matinal (< 15 minutes) et à un épanchement est évocatrice d'une poussée inflammatoire.
  • Retentissement fonctionnel : une limitation du périmètre de marche, des difficultés à monter ou descendre les escaliers.

Plusieurs indices algofonctionnels sous forme de questionnaires, comme l'indice WOMAC (Western Ontario and MacMaster Universities index) ou l'indice de Lequesne, permettent de suivre l'évolution du retentissement de la gonarthrose.
Avec l'indice de Lequesne (cf. tableau 8.1) est même proposé un seuil (≥ 10–12) incitant à discuter l'indication potentielle de prothèse totale de genou.

À l'examen clinique

Il doit être bilatéral et comparatif, se faire debout, à la marche puis en position couchée.

  • Inspection : recherche d'une déviation axiale, d'un flessum (impossibilité d'extension complète du genou), d'une boiterie, voire mise en évidence d'un dérobement ou d'un lâchage (flexion spontanée du membre inférieur en position debout, témoignant d'une faiblesse quadricipitale), recherche d'une amyotrophie des muscles de la loge antérieure de cuisse (quadriceps).
  • La palpation et la mobilisation peuvent retrouver :
    – une douleur et/ou une limitation douloureuse lors de la mobilisation du genou ; la flexion du genou (distance talon-fesse) est longtemps conservée dans la gonarthrose ;
    – des craquements à la flexion, traduisant une atteinte du cartilage articulaire ;
    – un épanchement intra-articulaire, par la recherche d'un choc patellaire ou d'un signe du flot ;
    – une tuméfaction dans le creux poplité, à la face médiale, témoin d'une bourse synoviale nommée kyste poplité, qui est le signe d'un épanchement important. Le kyste poplité peut se rompre dans le mollet lors de certains mouvements en compression, entraînant une douleur brutale et un tableau de pseudophlébite.
  • Test des stabilités antéropostérieures (conservées) et latérales (laxité médiale ou latérale) ; ces dernières sont un élément fondamental dans les indications ultérieures de la chirurgie.
  • L'examen des hanches est systématique , afin d'éliminer une douleur de coxarthrose projetée au genou et afin de rechercher une atteinte coxofémorale associée.

Imagerie

Les radiographies vont aider à confirmer le diagnostic évoqué cliniquement.
Il faudra systématiquement demander l'ensemble des incidences radiographiques suivantes de manière bilatérale et comparative :

  • une incidence de face en appui bipodal, rotation nulle, genoux en extension ;
  • un profil ;
  • un défilé fémoropatellaire à 30° de flexion ;
  • une incidence en schuss (de face, en charge, à 30° de flexion, cliché en postéro-antérieur), qui doit être systématique : il permet de voir le compartiment postérieur — celui qui est le plus précocement atteint — et de révéler un pincement de l'interligne articulaire qui ne serait pas vu sur le cliché en extension.

On retrouve les signes cardinaux d'arthrose (fig. 8.7 et 8.8), qui ne sont pas forcément tous présents :

  • pincement de l'interligne localisé à un des deux compartiments fémorotibiaux (une atteinte des deux compartiments fémorotibiaux est possible dans la gonarthrose primitive, mais se voit aussi dans les arthroses secondaires) ;
  • ostéophytose : dite marginale externe, mais également interne, appréciée sur le cliché de face ou des épines tibiales, visualisée sur le cliché en schuss, ou encore située en avant et en arrière du tibia, sur la face postérieure du condyle et au-dessus de la trochlée, analysée sur le profil. Les ostéophytes sont spécifiques de l'arthrose ;
  • ostéosclérose sous-chondrale ;
  • géodes sous-chondrales.


Fig. 8-7 :Gonarthrose fémorotibiale médiale : évolution radiographique avec apparition d'une déformation en varus.

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Fig. 8-8 :Gonarthrose fémorotibiale médiale.

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L'IRM n'a pas d'intérêt en cas de gonarthrose typique . Elle n'est réalisée qu'en cas de doute pour éliminer certains diagnostics différentiels (atteinte méniscale, ostéonécrose, fissure) (cf. infra).

Biologie

Aucun examen biologique n'est nécessaire au diagnostic. Il n'y a pas de syndrome inflammatoire (CRP et VS normales).
Il n'y a pas de test de routine permettant d'évaluer la dégradation du cartilage.
En cas d'épanchement, la ponction retrouvera un liquide mécanique.

3.3.2 - Diagnostic différentiel

Le diagnostic associant douleur mécanique du genou et anomalies radiographiques compatibles chez un patient ayant un âge compatible et des facteurs de risque de gonarthrose est habituellement facile.
Il faudra parfois évoquer :

  • atteinte coxofémorale projetée ;
  • atteinte méniscale isolée, à évoquer devant :
  • début brutal chez un sujet jeune ;
  • notion de traumatisme ;
  • épisodes de blocage du genou ;
  • arthropathie microcristalline évoluant à bas bruit (intérêt de la ponction d'un épanchement) ;
  • ostéonécrose d'un condyle fémoral  ;
  • fissure d'un plateau tibial.

3.3.3 - Pronostic

L'évolution de la gonarthrose se fait par poussées et est très variable à l'échelon individuel .
Il existe des périodes douloureuses alternant avec des périodes d'accalmie.
Il existe parfois une discordance radioclinique avec des patients peu douloureux et gênés bien que la radiographie montre des signes d'arthrose évoluée, et inversement.
La présence d'un épanchement articulaire à répétition ou chronique est un facteur de mauvais pronostic d'évolution de la gonarthrose.

3.3.4 - Formes cliniques

Gonarthrose destructrice rapide

Définie par une aggravation rapide du pincement articulaire de plus de 50 % en 1 an.
Elle touche particulièrement les patients présentant des épanchements chroniques ou récidivants du genou.
Il faut alors rechercher l'existence d'une chondrocalcinose articulaire associée.

Secondaires à une autre pathologie (gonarthroses secondaires)

Certaines gonarthroses sont secondaires à :

  • une arthrite chronique : polyarthrite rhumatoïde, spondyloarthrite périphérique, arthrite septique, arthropathie microcristalline ;
  • une ostéonécrose évoluée ;
  • une maladie de Paget.

Le contexte clinique et la radiographie standard (montrant typiquement une atteinte tricompartimentale) suffisent en général à évoquer ce diagnostic de gonarthrose secondaire.

3.3.5 - Traitement

Traitement médical

Il est pluridisciplinaire.
Il combine systématiquement traitement pharmacologique et traitement non pharmacologique et vise à contrôler la douleur et à limiter le retentissement fonctionnel.
Le traitement médical prendra en compte le nombre d'articulations arthrosiques symptomatiques — s'agit-il d'une gonarthrose isolée incitant aux traitements locaux ? ou s'agit-il d'une gonarthrose dans le cadre d'une polyarthrose ? — ainsi que la présence de comorbidités qui peuvent limiter certaines prescriptions médicamenteuses (par exemple, AINS per os).
Le traitement médical est résumé tableau 8.3.
 
Tableau 8.3 : Traitement médical de la gonarthrose.
Mesures non pharmacologiquesMesures pharmacologiques

  • Éducation du patient avec mesures de ménagement articulaire :
    – éviter les marches dans les périodes les plus douloureuses
    – promouvoir l'activité physique (marche, vélo, piscine) en dehors des poussées
    – éviter les stations debout prolongées, le port de charges lourdes
  • Perte de poids si surpoids ou obésité
  • Lutter contre le flessum par un programme d'auto-exercices
  • Cure thermale : notamment en cas de gonarthrose dans un contexte de polyarthrose ou en cas de comorbidités limitant les prescriptions médicamenteuses ; a souvent un effet à la fois antalgique et psychologique

  • Antalgique simple de palier I à la demande en fonction de la douleur et non en systématique (paracétamol jusqu'à 3 g par jour).
  • AINS per os en cure courte en l'absence de contre-indication, à la posologie efficace la plus faible et pour la durée la plus courte ; prendre en compte les comorbidités et contre-indications (notamment : maladies cardiovasculaires, antécédent d'ulcère gastroduodénal, insuffisance rénale, maladie hépatique).
  • AINS en topiques locaux
  • Antalgiques de palier II (codéine, tramadol) et exceptionnellement de palier III (morphine)
  • Infiltrations intra-articulaires de dérivés cortisoniques, notamment en cas d'épanchement
  • Infiltrations intra-articulaires d'acide hyaluronique (ont été déremboursées par l'assurance maladie)
  • Antiarthrosiques d'action lente (glucosamine, chondroïtine, insaponifiables d'avocat et de soja) dont l'efficacité est modeste (ont été déremboursés par l'assurance maladie)


 
L'efficacité du traitement pourra être évaluée sur :

  • périmètre de marche ;
  • douleur à la marche, mesurée par exemple sur une EVA ;
  • régression de l'épanchement si présent initialement ;
  • indices algofonctionnels (Lequesne, WOMAC) ;
  • indices de qualité de vie.

La tolérance devra être évaluée (particulièrement celle des AINS per os et des opioïdes).
Le renouvellement des traitements, particulièrement pharmacologiques, sera à discuter en fonction de leur efficacité et de leur tolérance.

Traitement chirurgical

Il est à proposer en cas de gonarthrose fémorotibiale symptomatique avec retentissement clinique important (douleur et handicap) malgré un traitement médical bien conduit. L'imagerie seule ne permet pas de porter l'indication de la mise en place d'une prothèse de genou car le degré de l'atteinte radiographique est imparfaitement corrélé aux symptômes. On pourra s'aider de l'indice de Lequesne (seuil retenu ≥ 10–12).

Prothèses du genou

  • Indications :
    – prothèse totale de genou : gonarthrose symptomatique avec retentissement fonctionnel malgré un traitement médical bien conduit ;
    – prothèse unicompartimentale : gonarthrose unicompartimentale isolée sans trouble de l'axe ni laxité ligamentaire.
  • Suites opératoires : reprise de la marche progressive ; nécessite une rééducation prolongée d'environ 6 semaines.

Traitement dit conservateur par ostéotomie de réaxation

  • Indications : gonarthrose unicompartimentale sur genu varum pour l'ostéotomie de valgisation ou sur genu valgum pour l'ostéotomie de varisation en cas de gonarthrose sur genu valgum chez un sujet < 65 ans symptomatique en l'absence de laxité ligamentaire.
  • En pratique : rarement effectuée.
  • Objectifs : effet symptomatique et permet de retarder la pose d'une prothèse totale de genou d'environ 12 ans.

3.4 - Arthrose fémoropatellaire

3.4.1 - Facteurs de risque

  • Femme.
  • Dysplasie fémoropatellaire (subluxation latérale de la patella).
  • Chondromalacie patellaire (amincissement localisé du cartilage patellaire avec ulcération et fissure visible en IRM).
  • Antécédent de luxation de la patella.

3.4.2 - Clinique

Atteinte souvent bilatérale et symétrique.

À l'interrogatoire

  • Douleur mécanique de la face antérieure du genou.
  • Majorée lorsque la patella est plaquée sur les trochlées fémorales (la descente plutôt que la montée des escaliers, la station assise prolongée : signe du cinéma, l'agenouillement).
  • Épanchement articulaire possible.

À l'examen clinique

  • Examen bilatéral et comparatif.
  • La douleur est réveillée :
    – à l'extension contrariée de la jambe ;
    – à la pression de la patella sur le genou fléchi ;
    – à la palpation de la patella ;
    – à la manœuvre du rabot (douleur déclenchée au frottement de la patella contre la trochlée) ;
    – à la manœuvre de Zohlen : douleur lorsque l'examinateur s'oppose à l'ascension de la patella lors de la contraction du quadriceps.
  • Épanchement possible.
  • Il faudra examiner les autres compartiments du genou et les hanches.

3.4.3 - Radiographie

On réalisera des clichés de face, de profil en charge, en schuss, et une incidence axiale à 30° ou 60°, qui permettra de confirmer le diagnostic.
Les incidences axiales mettent en évidence une diminution ou une disparition de l'interligne latéral, associée à une ostéophytose patellaire trochléenne latérale (fig. 8.9), visible aussi sur le profil.

Fig. 8-9 :Arthrose fémoropatellaire avec amincissement de l'interligne latéral.

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On recherchera des signes de dysplasie trochléopatellaire (fig. 8.10) (angle trochléen normalement inférieur à 140° sur les incidences fémoropatellaires à 60° de flexion).

Fig. 8-10 :Dysplasie trochléopatellaire.

COFER



3.4.4 - Traitement

  • Le traitement est surtout médical, associant kinésithérapie et traitements antalgiques :
    – rééducation isométrique du muscle vaste médial de façon à réaxer la patella avec apprentissage d'auto-exercices ;
    – limiter les sports très sollicitants lors des phases douloureuses (ski, vélo) ;
    – AINS topiques ou per os à la dose la plus faible et pour la durée la plus courte possible en respectant les contre-indications ;
    – antalgiques simples ;
    – infiltrations de corticoïdes en cas d'épanchement ;
    – l'efficacité des injections d'acide hyaluronique (viscosupplémentation) n'est pas démontrée dans cette indication.
  • Chirurgie :
    – rare et seulement en cas de retentissement clinique important malgré un traitement rééducatif et antalgique bien conduit ;
    – différentes techniques chirurgicales sont proposées : transposition de la tubérosité tibiale, patellectomie, arthroplastie totale de la patella.

4 - Arthrose digitale

4.1 - Définition

L'arthrose digitale (base du pouce, articulation interphalangienne distale et, moins souvent, articulation interphalangienne proximale) est avec le genou la localisation la plus fréquente de l'arthrose en général. Elle est plus volontiers associée à l'arthrose des genoux et elle s'intègre parfois dans une polyarthrose.

4.2 - Épidémiologie

Elle prédomine chez les femmes après la ménopause et chez les sujets ayant des antécédents familiaux au premier degré. Parmi les sujets avec arthrose digitale radiographique, 20 % en souffrent, sous la forme de douleurs mécaniques pouvant toucher tous les doigts. L'atteinte des articulations interphalangiennes distales est la forme la plus fréquente, suivi de l'arthrose de la base du pouce (arthrose trapézométacarpienne ou rhizarthrose), favorisée par des microtraumatismes répétés ou par un vice de la statique du premier métacarpien.

4.3 - Diagnostic

4.3.1 - Clinique

À l'interrogatoire

  • Douleur mécanique chronique des doigts et/ou de la base du pouce.
  • Apparition progressive de tuméfactions nodulaires des articulations interphalangiennes distales et/ou proximales parfois douloureuses, entraînant des déformations importantes.
  • Absence de douleur des métacarpophalangiennes.
  • Évaluer le retentissement fonctionnel.

À l'examen clinique

  • Il doit être bilatéral et comparatif.
  • Douleur à la palpation et à la mobilisation des articulations interphalangiennes proximales et distales et/ou de la base du pouce.
  • Recherche de synovites des interphalangiennes et de nodules appelés nodules d'Heberden sur les IPD et nodules de Bouchard sur les IPP (fig. 8.11A).


Fig. 8-11 :Arthrose digitale.
A. Atteintes caractéristiques des articulations interphalangiennes distales et proximales. B. Rhizarthrose. Déformation du pouce avec pouce adductus.

COFER



  • Dans les formes évoluées de rhizarthrose, on constate un pouce adductus associé à une amyotrophie de la loge thénar (fig. 8.11B).

Quand les déformations sont typiques, le diagnostic est purement clinique, sans avoir besoin des radiographies.
Le diagnostic peut être confirmé sur une radiographie des mains de face qui montrera les signes habituels d'arthrose :

  • pincement de l'interligne qui, sur ces petites articulations, est souvent global ;
  • ostéophytose latérale, parfois très exubérante et responsable des nodosités ;
  • géodes sous-chondrales ;
  • ostéocondensation sous-chondrale.

4.4 - Pronostic

L'arthrose digitale est parfois invalidante par les douleurs et/ou la gêne fonctionnelle et/ou la gêne esthétique. Des indices algofonctionnels permettent de quantifier son retentissement. L'évolution montre une régression et une diminution des douleurs dans le temps au prix de l'installation de nodules, parfois déformants, possiblement handicapants sur le plan fonctionnel dans les gestes de la vie quotidienne.

4.5 - Forme clinique particulière : arthrose digitale érosive

L'arthrose érosive des doigts est une forme destructrice d'arthrose définie par la présence d'érosion à la radiographie des mains.
Cliniquement, il s'agit d'une forme plus sévère avec :

  • des douleurs intenses, d'horaire mixte (mécanique + inflammatoire), évoluant sur plusieurs semaines ;
  • des synovites des interphalangiennes distales et proximales ;
  • une gêne fonctionnelle plus importante que la forme non érosive.

La radiographie des mains de face confirme l'atteinte érosive et destructrice avec des géodes et un pincement total de l'interligne articulaire avec un aspect en « aile de mouette » (fig. 8.12). La destruction ou l'effondrement de la plaque osseuse sous-chondrale est un équivalent d'érosion.

Fig. 8-12 :Arthrose digitale érosive touchant les articulations interphalangiennes distales avec aspect en « aile de mouette ».

COFER



Dans les formes les plus inflammatoires, ces atteintes peuvent ressembler à un rhumatisme inflammatoire, en particulier au rhumatisme psoriasique compte tenu des localisations sur les articulations interphalangiennes distales.

4.6 - Traitement

4.6.1 - Traitement médical

Le traitement médical est résumé dans le tableau 8.4.
 
Tableau 8.4 : Traitement médical de l'arthrose digitale.

Mesures non pharmacologiquesMesures pharmacologiques

  • Éducation du patient avec mesures de ménagement articulaire lors des poussées
  • Auto-exercices de renforcement musculaire et de travail des amplitudes articulaires
  • Orthèse digitale pour mettre l'articulation au repos et possiblement éviter les déformations notamment des articulations

  • Antalgique simple de palier I à la demande en fonction de la douleur et non en systématique (paracétamol jusqu'à 3 g par jour).
  • AINS topiques locaux (à préférer dans cette localisation d'arthrose)
  • AINS per os en cure courte en l'absence de contre-indication, à la posologie efficace la plus faible et pour la durée la plus courte possible ; prendre en compte les comorbidités et contre-indications (notamment : maladies cardiovasculaires, antécédent d'ulcère gastroduodénal, insuffisance rénale, maladie hépatique)
  • Rarement antalgiques de palier II (codéine, tramadol) et exceptionnellement de palier III (morphine)
  • Infiltration intra-articulaire de dérivés cortisoniques en cas de douleurs rebelles
  • Antiarthrosiques d'action lente (chondroïtine sulfate) parfois recommandés (ont été déremboursés)


 
Les injections d'acide hyaluronique n'ont pas leur place dans le traitement de l'arthrose digitale.

4.6.2 - Chirurgie

De l'arthrose des interphalangiennes

  • Indications : cas exceptionnels compte tenu du caractère extensif et diffus de la maladie.
  • Types de chirurgie : en fonction des déformations, on peut proposer des interventions de réaxation, de blocage de l'articulation (arthrodèse) ou de remplacement prothétique.

De la rhizarthrose

  • Indications : rhizarthrose symptomatique malgré un traitement médical bien conduit.
  • Types de chirurgie : trapézectomie ou prothèse trapézométacarpienne.

5 - Autres localisations arthrosiques

Les localisations arthrosiques en dehors de la main, du genou et de la hanche sont rares.
Elles doivent systématiquement faire rechercher une cause associée (traumatique, microcristalline, rhumatisme inflammatoire, etc.).

5.1 - Arthrose de l'épaule, ou omarthrose

L'omarthrose est l'arthrose de l'articulation scapulo-humérale.
Il existe deux types d'omarthrose :

  • l'omarthrose excentrée, définie par la présence d'une ascension de la tête humérale qui n'est plus en face de la glène scapulaire ; elle est secondaire à une rupture de coiffe (fig. 8.13) ;


Fig. 8-13 :Radiographies d'une omarthrose excentrée secondaire à la rupture de la coiffe des rotateurs à gauche et d'une omarthrose centrée à droite.

COFER



  • l'omarthrose centrée, sans ascension de la tête humérale ; plus rare que la forme excentrée, elle doit faire rechercher une pathologie articulaire destructrice comme la polyarthrite rhumatoïde ou la chondrocalcinose.

Clinique :

  • douleur mécanique de l'épaule ;
  • raideur secondaire.

Radiographie : on demande un cliché de face et de profil des deux épaules (examen bilatéral et comparatif) et les rotations médiales et latérales de l'épaule, à la recherche de calcifications à l'insertion des tendons de la coiffe, de signe d'une tendinopathie, autre diagnostic différentiel de douleurs mécaniques de l'épaule. Les radiographies confirment le diagnostic devant la présence des signes habituels (pincement, ostéophytes, géodes et ostéocondensation) et détermineront si l'omarthrose est centrée ou excentrée.
Traitement : le traitement médical est symptomatique (antalgiques, AINS, infiltrations de corticoïdes et rééducation). En cas d'omarthrose douloureuse et résistante au traitement médical, on pourra proposer :

  • une prothèse inversée (zone arrondie au niveau de la scapula) en cas d'omarthrose excentrée ;
  • une prothèse totale de l'épaule en cas d'omarthrose centrée et donc en l'absence de rupture de coiffe.

5.2 - Arthrose de la cheville

L'arthrose de la cheville est presque toujours secondaire. Différentes étiologies sont à évoquer :

  • post-traumatique ;
  • nécrose du talus ;
  • chondrocalcinose ;
  • maladie de surcharge comme l'hémochromatose.

Clinique :

  • douleurs mécaniques de la cheville en orthostatisme et à la marche ;
  • raideur avec un déficit de l'extension.

La radiographie de la cheville de face et de profil confirme le diagnostic.
Traitement :

  • médical : antalgiques, AINS, infiltrations de corticoïdes, orthèse et rééducation ;
  • chirurgical : en cas d'échec du traitement médical (arthrodèse pour bloquer l'articulation et limiter les douleurs, prothèse totale possible dans certains centres spécialisés).




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